LES RÉPUBLICAINS

À L'ASSEMBLÉE NATIONALE

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LE JDD : Laurent Wauquiez a renoncé à concourir pour la présidence des Républicains. Que pensez-vous de sa décision ?

Eric CIOTTI : Laurent Wauquiez est celui qui dispose des meilleurs atouts pour espérer la victoire en 2027. Il a des convictions fortes, il a remarquablement réussi dans sa région et il incarne à la fois une droite des valeurs et une droite moderne. Je respecte son choix, porteur d’une véritable stratégie de retour au pouvoir de la droite républicaine. Pour autant, nous aurons aussi besoin, pour assurer l’alternance, d’une formation politique claire sur ses convictions et sur sa ligne, qui soit redevenue un laboratoire d’idées, qui prenne le tournant de la modernité et se saisisse des nouvelles attentes de l’opinion, en matière environnementale par exemple.

Etes-vous candidat à la présidence de LR ?

Ma décision définitive n’est pas prise, mais je suis prêt à relever le défi. Le résultat que j’ai obtenu au congrès de décembre dernier m’incite à défricher ce chemin de l’audace et du courage. J’ai engagé un travail pour proposer à la fois un rassemblement large et une offre politique modernisée, en phase avec les attentes des Français. Je prendrai ma décision dans quelques semaines.

Comment expliquez-vous l’échec de la droite à la présidentielle ?

La droite s’est recroquevillée, sociologiquement et territorialement. Nous avons perdu pied dans les villes. Je suis le seul député LR élu dans une ville de plus de 100.000 habitants. Les jeunes, les actifs et les cadres nous ont quittés. Si nous avons perdu, c’est d’abord parce que, depuis 2012, nous n’avons pas retrouvé de leader naturel. Et je le redis : je pense que Laurent Wauquiez peut répondre à cette question du leadership. Mais nous devons aussi faire notre révolution idéologique. Je crois à la nécessité d’affirmer une ligne politique résolument à droite, sans confusion, sans compromission. Plus que jamais, j’ai la conviction que les idées de droite - l’autorité, l’identité et la liberté- sont les réponses aux maux de notre pays. Si depuis 40 ans, la France décline, c’est parce que nous n’avons jamais véritablement appliqué des solutions de droite et ce, il faut bien le reconnaitre, même lorsque nous étions au pouvoir.

C’est-à-dire ?

Bien sûr, la crise économique de 2008 a entravé notre action au pouvoir, mais nous aurions dû aller beaucoup plus loin dans l’affirmation de l’autorité de l’Etat, réarmer ce dernier beaucoup plus tôt et beaucoup plus vite dans ses missions régaliennes, et être plus courageux dans la réforme de ce qui est devenu un monstre bureaucratique. Après dix ans de hollandisme-macronisme, nous sommes désormais les témoins de l’impuissance d’un exécutif qui prétend gouverner par la seule communication, pour masquer une inaction permanente. Le bilan est désastreux : l’effondrement de l’école de la République, qui prive des millions de jeunes Français de tout espoir de promotion sociale ; un endettement mortifère dont la cause est la montée de l’assistanat social au détriment de la rémunération du travail ; des fractures territoriales terrifiantes avec des quartiers entiers devenus des zones de non droit ; l’effondrement de notre système de santé et une inédite crise du logement.

Que préconisez-vous face à ce constat ?

La droite ne peut pas se contenter de rester dans l’incantation, comme le font les partis contestataires. Nous devons proposer un autre chemin : celui du courage de la réforme. Dans cinq ans, ceux qui auront contribué à ces échecs seront discrédités, et je ne crois pas que les Français aient envie d’engager le pays dans une aventure extraordinairement dangereuse. Il reste une ligne de crête, celle sur laquelle Les Républicains doivent conduire les Français si nous ne voulons pas voir sombrer notre pays. Évidemment, rien ne sera facile, mais ne pas tenter d’ouvrir cette voie serait condamner le pays à un déclin inéluctable. Si on ne change pas tout sur le fond comme sur la méthode, nous échouerons et je ne peux pas me résoudre à voir la famille politique du Général de Gaulle disparaître.

Les Républicains doivent-ils entamer un dialogue avec le RN ?

Seule la droite républicaine, qui incarne les piliers porteurs de la Ve République, peut être à la base d’un projet de renouveau. Ce projet devra être celui qui fera revenir vers nous tous ceux qui nous ont quittés, pour aller vers Emmanuel Macron ou vers Marine Le Pen. Je souhaite que les électeurs de droite se retrouvent, non pas dans des combinaisons mais derrière une ligne claire.

Certains élus Les Républicains menacent de claquer la porte si vous deveniez président du parti. Que leur répondez-vous ?

Que chacun a sa place dans notre famille politique. Je m’efforcerai toujours de rassembler les talents, les énergies. La capacité de notre parti à additionner des idées et des personnalités différentes est une force. Souvenons-nous de ce que Philippe Séguin et Charles Pasqua ont su faire ensemble en unifiant leurs forces. Moi aussi, je pourrais lancer des oukases, mais je ne le ferai jamais.

Vous dressez un bilan sévère de l’action d’Emmanuel Macron, mais, en même temps, la droite négocie avec le gouvernement sur le prix du carburant…Est-ce compatible ?

Tout en pointant les fautes lourdes de ce pouvoir, son absence de vision à long terme, nous voulons être une opposition utile pour le pays. Dans le nouveau contexte législatif, nous avons montré que, sans le vote des députés LR, aucun texte ne pouvait être adopté. Déjà avec Olivier Marleix, nous avons engrangé des succès, tels que la déconjugalisation de l’Allocation adulte handicapé, qui était portée par Aurélien Pradié et que le gouvernement avait systématiquement rejetée pendant cinq ans. Ce que nous avons obtenu sur les carburants sera aussi synonyme de gains considérables de pouvoir d’achat pour les Français. Et personne ne comprendrait que nous nous associons aux tentatives de déstabilisation de notre pays menées par les extrémistes de la Nupes.

Nicolas Sarkozy a soutenu une de vos adversaires, finalement battue, aux législatives dans les Alpes-Maritimes. Vous êtes-vous senti trahi ?

J’ai définitivement tourné la page avec Nicolas Sarkozy. C’est une blessure personnelle, bien sûr, mais je crois que la droite doit assumer de rompre ce lien de dépendance.

Propos recueillis par Christine Ollivier.

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