Mme la présidente

La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel

Madame la Première ministre, vous parlez souvent de République exemplaire. C’est pourquoi je voudrais vous interroger au sujet d’une situation qui est, hélas, loin d’être exemplaire. En effet, il s’agit de quelqu’un qui est champion de France des mises en examen et qui, pourtant, continue d’être membre du cabinet et conseiller du Président de la République – M. Solère, pour ne pas le nommer. Si je vous interroge, c’est parce que nous savons désormais qu’en sa qualité de conseiller du Président, il a eu accès à des informations en provenance du ministère de la justice, pourtant censées rester secrètes, sur une enquête en cours.

M. Ian Boucard

C’est scandaleux !

M. Patrick Hetzel

Or ces informations ont ensuite été transmises par M. Solère à celui qui était visé par l’enquête.

M. Maxime Minot

Sans foi ni loi !

M. Patrick Hetzel

Résultat : cette interférence a permis de protéger un réseau de trafiquants de drogue depuis la présidence de la République avec l’appui de l’un de vos ministères.

M. Fabien Di Filippo

Incroyable !

M. Patrick Hetzel

Madame la Première ministre, que comptez-vous faire pour que l’exemplarité que vous revendiquez ne soit pas qu’un discours mais se traduise véritablement dans les actes ?


Mme la présidente

La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

M. Olivier Véran

Il faut arrêter la calomnie. Ce que vous donnez ici, c’est l’interprétation d’un article de que j’ai moi-même lu ; soit nous n’avons pas lu le même article, soit nous ne l’avons pas vu avec les mêmes yeux. L’article est très clair : il reprend lui-même les propos du procureur général de Nanterre, lequel indique qu’il n’avait pas du tout eu connaissance de l’affaire qui intéresse le député auquel vous faites allusion.

M. Michel Herbillon

Il n’est pas député !

M. Pierre Cordier

Arrêtez de noyer le poisson !

M. Olivier Véran

Si le procureur général de Nanterre dit lui-même publiquement qu’il n’est pas au courant, comment voulez-vous que la Chancellerie le soit ? J’irai encore plus loin : comment voulez-vous que la Chancellerie fomente je ne sais quel complot ayant pour conséquence d’empêcher le démantèlement d’un réseau de trafic de drogue ?

M. Marc Le Fur

Ce n’est pas clair !

M. Olivier Véran

Enfin, monsieur le député, soyons sérieux, s’il vous plaît.

M. Olivier Marleix

Mis en examen et conseiller du Président de la République, cela ne vous dérange pas ?


Mme la présidente

La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel

Monsieur le ministre délégué, votre réponse est hallucinante. Treize mises en examen, triez, pour M. Solère ! Je vais en citer quelques-unes : détournement de fonds publics, trafic d’influence, financement illicite de campagne électorale, recel d’abus de biens sociaux… En somme, nous l’aurons tous compris, le Président de la République et sa majorité protègent un multirécidiviste. Bravo pour l’exemplarité !


Mme la présidente

La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

M. Olivier Véran

Sans reprendre mot pour mot ce qu’a dit tout à l’heure la Première ministre, je vous rappelle que vous êtes parlementaire, pas procureur. Vous parlez d’un parlementaire qui est lui-même mis en examen ; la justice tranchera.

Plusieurs députés du groupe LR

Il n’est pas parlementaire !

M. Olivier Véran

Pour le reste, je crois avoir fait la démonstration, par la lecture de l’article de sur lequel vous fondez votre question, que les hallucinations ne sont peut-être pas du côté que vous croyez.


 

Mme la présidente

La parole est à M. Francis Dubois.

M. Francis Dubois

Ma question porte sur les conséquences de votre réforme des retraites sur ceux qui exercent des métiers pénibles et ont des carrières hachées.En milieu rural et notamment en Corrèze, territoire fracturé par vos politiques successives, il y a beaucoup de femmes, conjointes d’agriculteurs qui, après avoir élevé leurs enfants, commencent ou reprennent une activité car le revenu agricole de leur conjoint ne suffit pas à subvenir à l’ensemble des besoins de leur famille. Elles reprennent la plupart du temps un emploi dans des métiers de service, le plus souvent comme aide-ménagère à domicile au service de nos seniors ou comme agent de service en Ehpad. J’en profite pour préciser que les agents de service en milieu médico-social font partie des oubliés du Ségur.

M. Thibault Bazin

Eh oui !

Mme Emmanuelle Anthoine

Il a raison !

M. Francis Dubois

De fait, en reprenant ainsi une activité tardive, elles ne disposeront pas d’une carrière complète et, arrivées à 64 ans, elles ne pourront prétendre à la pension minimale de 1 200 euros pour tous, mesure proposée initialement par le groupe LR, puis reprise par le Gouvernement.Monsieur le ministre, ma question est simple : que diriez-vous à Cécile, agent de service à l’Ehpad de Neuvic en Corrèze, mère de deux enfants qui, à l’âge de 64 ans, aura travaillé trente ans , soit 120 trimestres auxquels ne s’ajoutent que quatre trimestres par enfant – au lieu de huit dans le privé –, ce qui représente au total trente-deux années de service ? Elle aura eu une carrière usante et pénible, en travaillant le dimanche et les jours fériés, mais surtout une carrière incomplète. Quel sera le montant de sa pension ? Sera-t-il décent ?

M. Fabrice Brun

Bravo !


Mme la présidente

La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

M. Olivier Dussopt

La question que vous posez renvoie finalement à deux situations distinctes. La première concerne les territoires très ruraux – la Corrèze en fait partie, tout comme l’Ardèche, dont je suis élu – et les retraites agricoles. Vous avez notamment évoqué les carrières incomplètes. À l’occasion de l’examen du projet de loi que nous vous soumettons, nous proposons, par exemple, de compléter les dispositions qui ont été adoptées avec les propositions de loi visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles, que votre assemblée a examinées à l’initiative du président Chassaigne.Il s’agit de faire en sorte que l’éligibilité à la retraite minimale des agriculteurs, qui est pour le moment réservée à ceux qui ont eu une carrière complète d’exploitants agricoles indépendants, soit élargie à ceux qui ont dû abréger leur carrière du fait d’un problème d’incapacité ou d’inaptitude. Ce sont 45 000 retraités agricoles supplémentaires que nous allons ainsi pouvoir aider.

M. Jean-Yves Bony et M. Vincent Descoeur

Ce n’est pas cela, la question !

M. Olivier Dussopt

Vous m’interrogez aussi sur la situation des conjoints d’agriculteurs, qui sont très souvent des femmes ayant eu une carrière incomplète, parce qu’elles se sont occupées de leurs enfants ou ont exercé en tant qu’aidantes. Nous allons véritablement les accompagner, et de deux manières. Nombre de nos dispositions vont permettre de rehausser d’une centaine d’euros la retraite des conjointes collaboratrices et des conjoints collaborateurs,…

Mme Clémence Guetté

Vous êtes trop généreux, monsieur le ministre ! Une centaine d’euros, c’est incroyable !

M. Olivier Dussopt

…et ainsi permettre à ces femmes – pour l’essentiel – de voir leur retraite à nouveau revalorisée. Et puis nous allons faire autre chose : nous allons faire en sorte que des trimestres cotisés au titre de l’assurance vieillesse du parent au foyer (AVPF), que vous avez évoquée, ou du temps passé à exercer en tant qu’aidant, soient pris en compte de deux manières : la possibilité d’un départ anticipé pour carrière longue, par l’intégration de ces trimestres dans la durée requise de cotisation, et l’éligibilité au minimum de pension.

Mme Clémence Guetté

C’est le !

M. Olivier Dussopt

S’agissant de ce minimum de pension – vous le savez, monsieur le député –, l’objectif est de garantir 85 % du Smic à ceux qui ont une carrière complète rémunérée au niveau du Smic. Mais tous ceux qui iront au-delà de trente années cotisées par le travail ou par la validation de ces trimestres verront leur retraite revalorisée. C’est ainsi que 1,8 million de retraités actuels vont voir leur pension revalorisée, de même que 200 000 nouveaux retraités chaque année – sur les 800 000 départs à la retraite annuels. Sommes-nous au bout du chemin ? Non, mais c’est un progrès.


Mme la présidente

La parole est à M. Francis Dubois.

M. Francis Dubois

Outre le fait qu’ils sont les oubliés du Ségur, c’est pour les raisons que j’ai évoquées que, le 31 janvier dernier – et aujourd’hui encore –, tous les employés de l’Ehpad de Neuvic, y compris les personnels soignants, étaient grévistes tout en restant à leur poste auprès de nos seniors. En effet, ces femmes n’acceptent pas de travailler deux ans de plus pour une pension inférieure à 1 200 euros. Elles estiment que vous ne prenez pas en considération la pénibilité de leur emploi et leur dévouement auprès de nos aînés.


 

Mme la présidente

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz

Ma question s’adresse à Mme la Première ministre.Si notre système de retraite par répartition est bien menacé par des déficits à venir, on ne réglerait qu’une partie des problèmes en les envisageant uniquement au travers du prisme financier.

M. Pierre Cordier

Très bien !

Mme Marie-Christine Dalloz

Vous le savez, les députés Les Républicains sont très attachés à la revalorisation des petites retraites – ils sont d’ailleurs peut-être les seuls à évoquer souvent cette question.

M. Sylvain Maillard

Oh !

Mme Marie-Christine Dalloz

Vous avez répondu à notre attente en acceptant d’étendre aux retraités actuels le dispositif prévoyant une pension à 1 200 euros.

M. Sébastien Jumel

Ça ne fait pas le compte !

Mme Marie-Christine Dalloz

Dimanche, vous avez également annoncé que vous ouvriez le dispositif des carrières longues à ceux qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans, lesquels pourront ainsi partir à 63 ans et percevoir une retraite pleine avec quarante-trois annuités au lieu de quarante-quatre. Nous vous en remercions.Une difficulté persiste à propos des personnes qui ont commencé une carrière longue, voire très longue, avant l’âge de 18 ans. En effet, pour ces dernières, une durée de carrière de quarante-quatre ans sera nécessaire si elles veulent atteindre une retraite à taux plein.Comment comprendre ce traitement différent, cette pénalité d’un an au détriment des Français qui ont commencé à travailler très jeunes ? Je pense notamment aux apprentis, à ceux qui exercent des métiers manuels – ils sont nombreux dans nos circonscriptions. Comptez-vous améliorer le dispositif pour l’ensemble de ces personnes et enfin répondre à une attente légitime ?


Mme la présidente

La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

M. Olivier Dussopt

Je veux tout d’abord insister sur le fait que vous avez pris acte – et je vous en remercie – de plusieurs annonces faites par Mme la Première ministre à la suite de demandes émises par votre groupe mais aussi, car je ne veux oublier personne, par des groupes et par des parlementaires de la majorité. Cela dit, lorsque les choses vont dans le bon sens, peu importe qui en est à l’origine, l’essentiel est qu’elles avancent. Comme on dit parfois, lorsque le bébé est beau, il a plusieurs pères. En l’occurrence, il faut peut-être s’en féliciter si cela permet d’améliorer la loi.Vous avez évoqué la question des carrières longues en précisant – et je vous en remercie – que la Première ministre avait répondu à une attente en permettant à celles et ceux qui commencent à travailler avant 21 ans de bénéficier d’un départ anticipé d’un an, à condition, bien sûr, d’avoir cotisé cinq trimestres, comme le prévoient l’ensemble des dispositifs dits carrières longues. L’idée est, comme toujours, de rapprocher la durée de cotisation requise pour ceux qui commencent à travailler tôt de celle requise pour ceux qui commencent plus tard.Je l’ai dit tout à l’heure dans ma réponse à une autre question : avant 2003, l’écart entre ces durées de cotisation pouvait atteindre huit à neuf ans. Il faut souligner que, réforme après réforme, l’écart entre la durée d’affiliation au régime, dite DAR, soit la durée minimale exigée, pour ceux qui commencent à travailler tard, et la durée effective pour ceux qui commencent à travailler tôt, n’a cessé de se réduire. C’est la preuve d’une marche vers l’égalité. Cela a été construit au fil des réformes.Lorsque le dispositif dit carrières longues a été créé en 2003,…

M. Mansour Kamardine

J’étais là !

M. Olivier Dussopt

…ceux qui avaient commencé à travailler avant 16 ans devaient cotiser cinq trimestres mais aussi deux années supplémentaires. Avec cette réforme, leur durée de cotisation doit être supérieure d’un an seulement. Nous avons dupliqué ce système pour l’appliquer à ceux qui ont commencé à travailler avant 18 ans.La critique que vous exprimez en creux porte en réalité sur le dispositif qui avait été mis en place par la réforme Fillon. Les débats qui s’ouvrent nous permettront d’avancer sur cette question et de discuter. Nous avons beaucoup progressé sur le chemin vers l’égalité. Nous devons poursuivre sur cette voie en ayant à l’esprit un principe : la durée de cotisation n’est pas un plafond mais un plancher ; et une volonté : assurer la solidité du système.

Mme Sophia Chikirou

Il essaie de nous anesthésier !


Mme la présidente

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz

Vous l’avez souligné, nous voulons travailler de manière responsable et dans l’intérêt général, ce qui me semble important. Cependant, la question des carrières longues est essentielle. Si l’on accepte l’idée que les personnes qui ont commencé à 20 ou 21 ans cotisent pendant seulement quarante-trois ans, acceptons qu’il en soit de même pour ceux qui ont commencé plus tôt et remplissent toutes les conditions.


 

Mme la présidente

La parole est à M. Mansour Kamardine.

M. Mansour Kamardine

Les présidents Ciotti et Marleix ont exprimé leur volonté d’accompagner le Gouvernement dans une réforme des retraites qui soit juste, en particulier pour les plus petites d’entre elles. Si, pour le Gouvernement, la réforme juste concerne le territoire métropolitain, pour le groupe Les Républicains elle doit concerner aussi les territoires ultramarins.

M. Patrick Hetzel

Bien sûr ! C’est essentiel.

M. Mansour Kamardine

Or les ultramarins partent, en moyenne, plus tard à la retraite, perçoivent des pensions plus faibles et meurent plus jeunes ! En outre-mer, la retraite moyenne pour une carrière complète est de 20 % inférieure à la moyenne nationale et le taux de grande pauvreté des retraités est treize fois supérieur à celui de métropole. Pire encore, à Mayotte, la pension moyenne est de 276 euros alors que l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) est plafonnée, pour des raisons que j’ignore, à 50 % de celle de droit commun !La réforme des retraites est donc une occasion à saisir afin d’améliorer deux situations spécifiques : le système de retraite à Mayotte et les petites retraites agricoles en outre-mer, notamment aux Antilles. C’est pourquoi le groupe Les Républicains vous propose de mettre en place dans les territoires ultramarins un dispositif de rachat de trimestres à un prix raisonnable pour les agriculteurs et les travailleurs agricoles, de supprimer sans délai la discrimination de la décote de 50 % de l’Aspa à Mayotte et de porter la pension moyenne à Mayotte à 400 euros au moins, au lieu des 276 euros actuels.Aussi pouvez-vous, madame la Première ministre, préciser les initiatives que vous envisagez de prendre pour répondre à nos propositions et améliorer le sort des retraités ultramarins ?

M. Patrick Hetzel

Très bien !


Mme la présidente

La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

M. Olivier Dussopt

Vous évoquez les retraites en outre-mer, et vous avez raison de souligner que le régime qui y est appliqué crée des différences. Votre question revêt plusieurs aspects, à commencer par celui des salariés de l’agriculture. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, nous devons relever un défi : au-delà du régime général, la mise en place du régime complémentaire Agirc-Arrco doit être une priorité pour les salariés de l’agriculture. Cela relève toutefois d’une discussion entre les partenaires sociaux, puisque ce sont eux qui assurent la gouvernance de l’Agirc et de l’Arrco. Nous pouvons y œuvrer ensemble, à la fois pour mener un travail de conviction…

M. Benjamin Lucas

Un travail de conviction, vous ?

M. Olivier Dussopt

…et pour faire en sorte que les salariés de l’agriculture des territoires d’outre-mer soient mieux couverts, et de façon plus juste.Vous avez aussi évoqué les retraités à Mayotte. Vous le savez mieux que personne, la situation de ce territoire est très spécifique : le régime obligatoire ne s’y applique que depuis 1987, il n’y a pas de régime complémentaire obligatoire, et la durée de cotisation constatée est particulièrement basse. On n’y compte que 2 500 bénéficiaires du système de retraite, pour des pensions de 287 euros – niveau très faible. Plusieurs dispositifs ont été adaptés, que ce soit par le biais d’une minoration – vous avez évoqué l’allocation de solidarité aux personnes âgées – ou d’un mode de calcul parfois un peu plus favorable pour l’accès à certaines prestations – je pense notamment à la validation d’office d’un certain nombre de trimestres entre 1997 et 2002.Une période de convergence s’applique également en ce qui concerne les cotisations et le nombre de trimestres requis, pour partie jusqu’en 2023 et pour partie jusqu’en 2036.La situation de Mayotte n’est pas spécifiquement traitée dans le projet de loi que nous avons présenté avec Mme la Première ministre ; ce territoire n’y apparaît pas, car nous avons fait le choix de ne pas appliquer la réforme à Mayotte. Cela ne signifie pas pour autant que nous ne devons pas travailler la question. D’ici à l’examen du texte, je propose que nous réfléchissions, avec tous les parlementaires de Mayotte, à la façon dont nous pouvons améliorer la situation, la rendre plus juste, mieux protéger les retraités et accélérer la convergence à l’occasion d’une revalorisation et d’une amélioration des conditions de gestion des retraites à Mayotte.


Mme la présidente

La parole est à M. Mansour Kamardine.

M. Mansour Kamardine

Nous sommes à votre disposition pour y travailler pendant le débat qui a cours actuellement, et pas après : on nous a fait beaucoup de promesses, mais elles n’ont jamais été tenues depuis au moins quinze ans.

M. Jean-Yves Bony

Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent !


 

 

Mme la présidente

La parole est à M. Meyer Habib.

M. Meyer Habib

Vendredi dernier, nous avons célébré vendredi le 78anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz à l’occasion de la Journée internationale de commémoration de la Shoah : six millions de Juifs, dont deux millions d’enfants, déportés, gazés, brûlés, victimes de la folie meurtrière de la barbarie nazie, dans le silence des nations.Après un exil de deux mille ans, après l’Inquisition, après les pogroms cosaques, après la Shoah, le peuple juif est retourné à Jérusalem, sa terre ancestrale. En 1948, l’État d’Israël renaît – un État démocratique, moral et fort.Non, que ce soit clair : l’État d’Israël n’est pas une compensation de la Shoah, car le sionisme existe depuis deux mille ans. Mais la réalité est que si l’État d’Israël avait existé à cette époque, il n’y aurait jamais eu la Shoah – la Shoah que le régime sanguinaire iranien rêve de reproduire.C’est ce 27 janvier, jour symbolique, qu’un djihadiste a choisi pour abattre à Jérusalem, devant une synagogue, sept civils, dont une réfugiée ukrainienne – j’ai une pensée pour eux et leurs familles.Si la France a condamné cet attentat – je m’en réjouis –, une certaine gauche et des grands médias parlent de « colons juifs » et d’« ultraorthodoxes » pour justifier à demi-mot le terrorisme, le même que celui qui frappe aussi à Paris ou à Nice. Pas un mot de condamnation de la part de ceux-là mêmes qui, deux jours plus tôt, parlaient de massacres alors qu’Israël ne fait que se défendre et éliminer des bombes à retardement humaines avant qu’elles ne passent à l’acte. Pour cette gauche, tuer des Juifs, c’est de la résistance !Pire, ce sont les mêmes qui accueillent en héros à l’Assemblée nationale Salah Hamouri, cadre du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), organisation terroriste notamment responsable de l’attentat de la rue Copernic, qui a ensanglanté la France !Célébrer, dans le temple de notre démocratie, un terroriste qui a reconnu avoir programmé l’attentat contre le grand rabbin d’Israël, voilà le nouvel antisémitisme. Je ne parle pas d’antisionisme mais bien d’antisémitisme !

M. André Chassaigne

Scandaleux !

M. Meyer Habib

Madame la Première ministre, ne jugez-vous pas intolérable la visite de Salah Hamouri à l’Assemblée nationale ? À quarante-huit heures de la rencontre, à l’Élysée, entre le Premier ministre israélien et le Président de la République, quels sont les gestes forts que la France compte accomplir, afin de soutenir le gouvernement israélien dans la lutte contre le terrorisme ? (

M. André Chassaigne

Cette question est une honte !


Mme la présidente

La parole est à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Alexandre Loubet

Il fait quel temps à Kiev ?

Mme Catherine Colonna

Monsieur le député, je comprends votre émotion et je la partage. Vendredi, un Palestinien radicalisé a ciblé une synagogue à Jérusalem, dans une attaque abjecte, le jour de shabbat, au sortir de la prière et, qui plus est, un 27 janvier, journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de la Shoah.Vous l’avez dit, la France a aussitôt condamné cet attentat dans les termes les plus clairs. Nos pensées vont aux familles des personnes décédées et aux blessés. Certains groupes terroristes, en Palestine et ailleurs, ont célébré cette attaque, dans une posture de haine méprisable qui ne résoudra rien – au contraire.Semaine après semaine, nous assistons à une escalade très grave des tensions, en Israël et dans les Territoires occupés. On ne compte plus les actes de violence et les victimes. La trajectoire actuelle ne peut mener qu’à davantage d’affrontements, de haine et de souffrances. Il est indispensable de l’infléchir.La France réitère sa position : elle est déterminée à œuvrer à la paix, sur la base du droit international et de la solution à deux États – la seule qui permettra aux Israéliens et aux Palestiniens de vivre en paix et en sécurité, comme ils en ont le droit.Ce message constant de la France, le Président de la République le répétera au Premier ministre israélien, qu’il recevra jeudi soir. Pour ma part, je le porterai auprès d’autres pays de la région, où je me rendrai cette semaine. Il est urgent, tout autant que nécessaire, de restaurer un horizon politique qui manque aujourd’hui cruellement.


 

 

Mme la présidente

La parole est à M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix

À travers vous, monsieur le président de la Rada, c’est l’engagement, le courage et la résistance du peuple ukrainien que nous voulons honorer cet après-midi. Jour après jour, les Ukrainiens forcent l’admiration du monde. Pour nous, il n’y a aucun doute : oui, la Russie a violé la souveraineté ukrainienne et porte seule la responsabilité du retour de la guerre en Europe, avec son cortège insensé de crimes contre l’humanité, de Boutcha à Kharkiv.

Madame la Première ministre, si la France doit aider l’Ukraine – et notre pays n’a cessé d’étendre son soutien militaire, humanitaire et financier –, le conflit, figé depuis l’automne, connaît depuis plusieurs semaines des mouvements inquiétants, laissant entrevoir la perspective d’une offensive de grande ampleur de la Russie, qui pourrait aligner jusqu’à un demi-million de nouveaux conscrits.

Le président Poutine, habité par les idées de destruction et de reddition de l’Ukraine, s’est engagé dans une guerre qui n’a aucun sens politique ou économique – à moins de vouloir reconstituer le glacis soviétique. Malgré le maintien d’un fil de communication – parfois ténu – avec l’agresseur depuis le début du conflit, les espoirs de trouver une porte de sortie négociée à court terme s’amenuisent devant l’intransigeance russe : aucune négociation n’est évidemment possible tant que l’Ukraine est sous les bombes.

La France, grande puissance – européenne notamment – et membre de droit du Conseil de sécurité des Nations unies, a vocation à imaginer la fin de la guerre. Pourtant elle ne fait pas entendre sa voix singulière : notre pays donne le sentiment d’être à la remorque de ses partenaires européens et de son allié américain (« Oh ! » sur quelques bancs du groupe RE) , parfois en décalage avec eux et sans initiative propre. Elle n’est pas à la hauteur de son histoire : sans doute la position française souffre-t-elle de l’isolement du Président de la République jusque dans son propre pays,une des seules démocraties dans laquelle le chef de l’État n’évoque pas ses options stratégiques avec le Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

Madame la Première ministre, vous devez vous appuyer sur le Parlement pour construire la position française. Vous devez partager avec nous un état des lieux réaliste de nos capacités en matière de soutien militaire, et nous présenter les scénarios de désescalade et de paix pour l’Ukraine qui guident le Gouvernement. La solidarité de la France envers le peuple ukrainien sera d’autant plus solide qu’elle sera éclairée et partagée : êtes-vous prête à organiser un débat au Parlement sur ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.).