Question de M. Philippe GOSSELIN - Maintenance des centrales nucléaires
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Gosselin.
M. Philippe GosselinMa question s’adresse au ministre chargé du nucléaire en France.
M. Fabrice BrunQui est-ce ?
M. Philippe GosselinGérer les centaines de milliers de pièces d’une centrale nucléaire est un véritable casse-tête, c’est un vrai puzzle ! C’est pourquoi, au printemps dernier, le PDG d’EDF, a demandé la numérisation de dizaines de millions de données permettant de référencer ces pièces.Tout y passe dans nos cinquante-six réacteurs, et c’est très bien ! Grâce à des outils utilisant l’intelligence artificielle (IA), …
M. Fabrice BrunNous sommes sauvés !
M. Philippe Gosselin… une maintenance prédictive pourra être assurée : les références de toutes les pièces pourront être examinées à la loupe, pour en contrôler l’origine, l’état du stock, l’historique ou encore les entrées et les sorties. Évidemment, ces données sont sensibles et ne doivent pas tomber entre toutes les mains.
M. Fabrice BrunTout va bien dans le meilleur des mondes, n’est-ce pas ?
M. Philippe GosselinRappelons en effet qu’elles se rapportent à des installations nucléaires, dont les éléments commerciaux et industriels sont protégés par le secret. L’intérêt de la numérisation engagée est d’améliorer la gestion des stocks, si utile pour organiser une maintenance des installations dont la qualité a pu, encore récemment, être mise en doute.Le hic – parce qu’il y en a bien un –, c’est que tous ces secrets industriels seront confiés à Amazon…
M. Vincent DescoeurÇa, ce n’est pas possible !
M. Philippe BallardEh oui !
M. Philippe Gosselin…et à sa filiale Amazon Web Services (AWS), spécialisée dans les services de cloud, pour 860 millions d’euros. Telle est la mission sensible qui reviendra à Amazon.
M. Fabrice BrunC’est une sacrée fuite de données !
M. Vincent DescoeurIl va falloir ressortir les pastilles d’iode…
M. Philippe GosselinMonsieur ministre, je m’interroge : n’êtes-vous pas gêné d’agir contrairement à la stratégie nationale pour le cloud, qui vise notre souveraineté – vous l’avez d’ailleurs répété à l’envi – ou au moins la création d’un nuage sécurisé en France ou en Europe ? N’êtes-vous pas gêné de savoir que l’hébergement de données nucléaires sensibles relèvera pour une part du droit américain ? Vous n’êtes pourtant pas sans savoir qu’Edward Snowden a révélé dès 2013 que les services de renseignement américains se servaient de ces données. Nous, nous sommes gênés : que nous répondez-vous ?
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie et de l’énergie.
M. Philippe BallardBon courage pour la réponse !
M. Jean-François CoulommeNous sommes sauvés !
M. Maxime MinotOn va voir ce qu’il va pouvoir faire.
M. Fabrice BrunN’est-ce pas Christophe Béchu qui est chargé du nucléaire ?
M. Roland LescureMonsieur Gosselin, si vos propos étaient exacts, je serais tout aussi inquiet que vous. Je vais donc vous rassurer.
M. Philippe GosselinTout va très bien, madame la marquise !
M. Roland LescureLundi dernier, j’ai visité la centrale nucléaire du Bugey, en présence du PDG d’EDF Luc Rémont, de salariés d’EDF et de représentants des organisations syndicales. À la demande de ces dernières, nous avons justement évoqué cette question et le président-directeur général d’EDF s’est montré très clair à ce sujet : il s’agit seulement d’une expérimentation, qui ne concernera que les données classifiées C1. Vous connaissez la classification en vigueur et je puis donc vous assurer que toutes les données que vous avez mentionnées et dont le caractère est extrêmement sensible ne seront pas transmises à des tiers autres que des entreprises françaises souveraines.Soyez donc rassuré : si vous avez exprimé une telle crainte, c’est sans doute que vous avez été mal renseigné, comme le journal qui l’a relayée. Il n’est en aucun cas envisagé que des données sensibles soient transmises à qui que ce soit.
M. Fabrice BrunQuand c’est flou, il y a un loup.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Gosselin.
M. Philippe GosselinIl n’empêche : même si toutes les données que j’évoquais ne sont pas concernées, il a bien été question de transmettre un certain nombre d’entre elles vers un cloud non souverain. L’expérimentation est une chose et je n’ai rien contre les Américains, qui sont et resteront nos alliés, mais suis convaincu que notre intérêt, dans le domaine nucléaire comme dans d’autres, est de garantir la souveraineté de notre cloud : nous avons encore beaucoup à accomplir pour ce faire.
M. Vincent DescoeurIl a raison !
M. Fabrice BrunNous devons nous garder de tout angélisme.
Question de M. Vincent ROLLAND - Concurrence illégale de moniteurs de ski étrangers
Mme la présidente
La parole est à M. Vincent Rolland.
M. Vincent RollandMa question s’adresse à Mme la Ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques.J’appelle votre attention, madame la ministre, sur une situation devenue insupportable dans les stations de sports d’hiver, et ce depuis le début de la saison, que dis-je, depuis des années ! En effet, nous constatons la présence de nombreux moniteurs de ski étrangers qui, pour certains, ne possèdent pas la carte professionnelle requise et, pour d’autres, ne satisfont pas à leurs obligations fiscales et sociales. Pendant que nos professionnels de l’enseignement du ski payent de lourdes charges, une concurrence déloyale s’est donc organisée sous leurs yeux, à leur détriment !Certes, des contrôles coordonnés sont menés par l’administration et par la gendarmerie et l’Urssaf – l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales –, que je remercie pour leur implication. Mais la réalité est qu’elles manquent de moyens humains et de moyens réglementaires. Il faudrait que toute délivrance de carte professionnelle soit assortie de l’obligation pour le demandeur de fournir une attestation de conformité fiscale et sociale, quelle que soit sa nationalité, à l’instar de ce que les écoles de ski demandent à leurs moniteurs.
M. Jean-Pierre VigierIl a raison !
M. Vincent RollandÀ ce contexte particulier s’ajoute le rapport de la Cour des comptes, à charge et parfois caricatural, sur les sports d’hiver. Qu’en pensez-vous ! ?Madame la ministre, le problème de la concurrence déloyale est identifié : il faut le régler ! Un problème de même nature se pose aussi d’ailleurs pour les artisans taxi. Il est du rôle de l’État que de protéger l’activité de nos compatriotes.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques.
Mme Amélie Oudéa-CastéraJe vous remercie beaucoup pour votre question car vous abordez des enjeux qui sont importants, a fortiori dans un contexte marqué, depuis la crise du Covid, par l’augmentation du nombre de moniteurs étrangers qui viennent encadrer en France. Il est capital que nous contrôlions de manière très rigoureuse leurs titres et qualifications, mais aussi que nous sécurisions les conditions d’une concurrence la plus loyale possible en termes d’obligations fiscales et sociales.Vous évoquez les moyens de contrôle. Nous les renforçons : c’est le sens de la création, au 1 septembre dernier, du service national des métiers de l’encadrement du ski et de l’alpinisme, que j’ai chargé d’une mission de coordination de nos inspections et de l’évaluation de toutes ces questions. Je précise que pas plus tard qu’hier, à Courchevel, un contrôle interservices d’ampleur a été diligenté. La vigilance du ministère ne baissera pas d’un iota car ces enjeux sont absolument majeurs. J’ai d’ailleurs eu l’opportunité de m’en entretenir récemment avec le président du Syndicat national des moniteurs du ski français.Nous croyons dans l’avenir des sports d’hiver, vous le savez, et c’est le sens de la candidature de la France aux Jeux olympiques et paralympiques d’hiver de 2030.
M. Jean-Pierre VigierMerci la région Rhône-Alpes et à son président Wauquiez !
Mme Amélie Oudéa-CastéraL’ensemble de ce gouvernement et les administrations concernées sont ultramobilisés pour sécuriser partout et tout le temps le caractère à la fois loyal et efficace de nos activités, tant économiques que commercial.
Mme la présidente
La parole est à M. Vincent Rolland.
M. Vincent RollandNous, au groupe Les Républicains, sommes évidemment d’accord sur l’existence d’une concurrence, mais à la condition qu’elle soit loyale. Et il faut y veiller absolument.
M. Thibault BazinIl a raison !
Question de M. Alexandre PORTIER - Nomination d'une nouvelle ministre à l'Education nationale
Mme la présidente
La parole est à M. Alexandre Portier.
M. Alexandre PortierMadame la ministre de l’éducation nationale,…
Un député du groupe LREncore ?
M. Alexandre Portier…nous avons eu cinq ministres, oui, cinq ministres de l’éducation nationale différents en moins de vingt mois.
M. Patrick HetzelTurnover permanent !
M. Alexandre PortierCe n’est plus une valse ministérielle, c’est un naufrage.
Mme Émilie BonnivardTrès bien !
M. Alexandre PortierVotre nomination, madame la ministre, n’est pas une solution, c’est un symptôme, celui d’un gouvernement sans cap, sans stratégie, sans boussole pour notre école ; pire encore, sans colonne vertébrale. N’est-ce pas vous, madame la ministre, qui, en 2016, qualifiiez de fariboles la restauration de l’autorité et le port de l’uniforme ?
Mme Émilie BonnivardMais oui !
M. Alexandre PortierN’est-ce pas vous, madame la ministre, qui avez inventé le délit de blasphème, en lâchant publiquement la jeune Mila qui était la proie des islamistes sur les réseaux sociaux ?
M. Maxime MinotMais oui !
M. Alexandre PortierEt maintenant vous venez nous expliquer que votre feuille de route est celle de Gabriel Attal et qu’elle comprend notamment l’introduction de l’uniforme et la défense de la laïcité ? Mais de qui se moque-t-on ?
M. Fabien Di FilippoC’est l’héritière de Pap Ndiaye !
M. Alexandre PortierLa vraie question est de savoir si vous êtes vraiment ministre de l’éducation nationale.
M. Christophe BexÀ quoi servez-vous ?
M. Alexandre PortierEst-ce vous ou Gabriel Attal, vous ou Emmanuel Macron ? En 2016, vous parliez de supprimer le ministère de l’éducation nationale ; vous avez déjà commencé en supprimant celui de l’enseignement professionnel. Qu’allez-vous faire de l’éducation nationale, madame l’ex-garde des sceaux ? Êtes-vous là pour en prononcer la liquidation judiciaire ?
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Aurélien PradiéUne faille spatio-temporelle !
Mme Nicole BelloubetMonsieur Portier, j’ai eu l’occasion de vous lire récemment et je ne suis pas sûre que les attaques personnelles , surtout lorsqu’elles font appel à des informations inexactes, servent notre démocratie.
Mme Émilie BonnivardRien de personnel !
M. Jean-Pierre VigierC’est la vérité !
M. Xavier BretonAssumez vos positions !
Mme Nicole BelloubetPassons cependant sur ces éléments pour en venir au fond. J’ai, je le répète, deux objectifs : la réussite des élèves et le vivre-ensemble dans les écoles.
Mme la présidenteUn peu de calme, je vous prie !
Mme Nicole BelloubetJe souhaite renforcer la protection de nos personnels enseignants, notamment des chefs d’établissement, qui, tous les jours, luttent pour faire vivre les principes de la République. Parmi ces principes, il y a celui de la laïcité, auquel je suis, depuis longtemps, profondément attachée…
M. Laurent JacobelliOn l’a vu, oui !
Mme Nicole Belloubet…dans la mesure où il représente la réussite de la mixité et plus largement de notre République.
Mme la présidente
La parole est à M. Alexandre Portier.
M. Alexandre PortierIl n’y a là aucune attaque personnelle , uniquement des verbatim de propos que vous aviez tenus. La différence entre vous et moi, c’est que moi, j’assume totalement ce que j’écris. On vous attend sur le fond quand vous voulez !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Nicole BelloubetMonsieur le député, pour que nos élèves réussissent à maîtriser les apprentissages fondamentaux, qui représentent la base, il faut respecter quatre principes dans les établissements,…
M. Aurélien PradiéLe laxisme au ministère de la justice, ce n’était pas vous ?
Mme Nicole Belloubet…et j’y veillerai : des règles claires pour tous ;…
M. Inaki EchanizLa fermeture des classes !
Mme Nicole Belloubet…le respect de ces règles – c’est essentiel ; la protection de l’ensemble des acteurs éducatifs et des élèves, lorsqu’ils en ont besoin ; la restauration de l’autorité – une autorité proportionnée et bien comprise. Voilà les principes que je m’attacherai, avec la représentation nationale, à faire vivre.
M. Fabien Di FilippoQui vous a forcée à accepter ce poste ?
Question de M. Hubert BRIGAND - Diffusion de la culture en milieu rural
Mme la présidente
La parole est à M. Hubert Brigand.
M. Hubert BrigandJ’adresse ma question à Rachida Dati, ministre de la culture et candidate à la mairie de Paris. Je tenterai, ce faisant, d’apaiser l’atmosphère électrique qui règne dans l’hémicycle. Mme Dati nous a annoncé le Printemps de la ruralité : la formule m’a interloqué, car la ruralité, c’est mon cheval de bataille. Si j’ai bien compris, il s’agira d’organiser des rencontres entre des services ministériels et la population. Je connais Mme Dati pour l’avoir rencontrée une fois il y a une quinzaine d’années : elle m’avait expliqué que pour réorganiser efficacement la justice en France, il fallait supprimer les tribunaux ruraux. Tout devait être concentré dans les grandes villes, pour gagner en efficacité, en justice et en rapidité ! En d’autres termes, il s’agissait plutôt de désorganiser que de réorganiser.Je retrouve Mme Dati au ministère de la culture, de même que je retrouve Mme Belloubet au ministère de la justice – j’espère que ce n’est pas un recyclage ; jamais deux sans trois ! J’ai cru comprendre – en tout cas, je l’espère – que Mme Dati avait un programme pour la culture en milieu rural ; rappelons tout de même que les élus locaux, départementaux ou municipaux, ont déjà fait beaucoup pour la culture dans la ruralité. J’ai aussi cru comprendre que Mme Dati promouvait la culture pour tous, pas seulement pour les deux ans à venir, à Paris, mais également en province. J’attends de connaître plus en détail ses propositions. Nous, nous aimons bien la culture classique, traditionnelle – le rap aussi, un peu, mais pas seulement. Mme Dati veut un égal accès à la culture, moi aussi !
M. Sébastien JumelQuelle est la question ?
M. Hubert BrigandAprès cette longue explication, j’en viens à ma question : compte tenu de la situation financière de la France, dont la dette dépasse 3 000 milliards, avec quels moyens comptez-vous assurer une bonne diffusion de la culture en milieu rural, à l’égal de Paris ?
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de la culture.
Mme Rachida DatiUne chose est sûre, monsieur le député : si vous voulez être soutenu et subventionné pour devenir humoriste, je suis prête ! Il y a de quoi faire, même si je ne vous trouve pas très drôle. L’humour peut avoir sa part d’élégance, mais vous en manquez.
M. Nicolas ForissierAu moins a-t-il une colonne vertébrale, lui !
Mme Rachida DatiVous avez évoqué la réforme de la carte judiciaire : en la matière, j’ai simplement appliqué ce que les députés qui vous entourent ont souhaité.Je suis une responsable politique qui tient ses engagements.
M. Raphaël SchellenbergerVous êtes surtout candidate à la mairie de Paris !
Mme Rachida DatiVous appréhendez le Printemps de la ruralité avec mépris et ironie ; pas moi. Les mesures que je souhaite déployer correspondent au programme du groupe Les Républicains – votre groupe, monsieur le député.
M. Sébastien JumelMonsieur le Premier ministre, j’ai un problème !
Mme Rachida DatiSi je suis ministre de la culture et que je m’intéresse à la ruralité, c’est parce que ses 22 millions d’habitants n’ont pas accès à la culture dans les mêmes conditions que les autres. Que m’ont demandé les maires ruraux, soutenus par Laurent Wauquiez ? Ils souhaitent qu’une ingénierie culturelle leur soit dédiée pour les soutenir : je le ferai.
M. Jean-Paul LecoqAvec quel argent ? Avec Monsanto comme sponsor ?
Mme Rachida DatiTous les habitants des zones rurales ont-ils accès à la culture dans les mêmes conditions que les autres ? Non. Est-il facile de se rendre à un spectacle ou à un concert quand on vit en milieu rural ? Pas davantage. Nous nous heurtons à un problème de mobilité des spectateurs, mais aussi des œuvres.
M. Vincent DescoeurLes collectivités locales proposent des activités culturelles dans les territoires !
Mme Rachida DatiC’est pourquoi j’ai lancé une consultation en ligne, à laquelle je vous invite à répondre très sérieusement – vos électeurs seraient fort intéressés de connaître vos propositions. Les directions régionales des affaires culturelles (Drac) me feront également remonter des préconisations, ce à quoi s’ajoutera une mission parlementaire.
Question de M. Olivier MARLEIX - Blocages à Mayotte
Mme la présidente
La parole est à M. Olivier Marleix.
M. Olivier MarleixPour la troisième semaine consécutive, Mayotte est paralysée par la mobilisation de la société civile, qui manifeste massivement et bloque les voies de circulation. Les causes de cette grave crise sont l’explosion de l’insécurité et l’amplification de l’immigration clandestine depuis l’arrêt de l’opération Wuambushu, qui était censée restaurer l’État de droit.
M. Patrick HetzelTrès juste !
M. Olivier MarleixLa cause réside également dans l’absence de réponse aux alertes des élus de Mayotte,…
M. Raphaël SchellenbergerExactement !
M. Olivier Marleix…en particulier celles de notre collègue Mansour Kamardine, dont la demande de réunion d’urgence avec le Gouvernement est restée sans suite.
M. Patrick HetzelC’est bien dommage !
M. Olivier MarleixC’est donc désormais la rue qui s’exprime. Les Mahorais refusent, et ils ont raison, que Mayotte devienne le Lampedusa de l’océan Indien et que les villages et les quartiers soient placés sous le joug de gangs de criminels qui s’en prennent aux familles, aux travailleurs et aux enfants.Monsieur le Premier ministre, quand votre Gouvernement prendra-t-il enfin des mesures à la hauteur, pour mettre un terme aux flux migratoires venus des Comores et désormais de la Corne de l’Afrique ? Quand mobiliserez-vous les moyens de la marine nationale pour les stopper physiquement ? Quand présenterez-vous le projet de loi relatif à Mayotte que vous avez évoqué dans votre déclaration de politique générale et qui devait être transmis aux élus de ce département dès le mois de février ?
M. Fabien Di FilippoParoles, paroles !
M. Olivier MarleixQuand lancerez-vous une opération Wuambushu puissance deux, voire puissance quatre, pour reconquérir les territoires perdus de la République à Mayotte ?
M. Patrick HetzelExcellent !
M. Olivier MarleixSurtout, quand reviendrez-vous sur ce droit du sol inconditionnel qui incite tant de Comoriens et d’Africains à affluer vers Mayotte ? – je pense en particulier aux mesures censurées par le Conseil constitutionnel.Voilà, monsieur le Premier ministre, les questions que se posent les habitants de Mayotte et que je vous adresse en leur nom.
Mme la présidente
La parole est à M. le Premier ministre.
M. Gabriel AttalLa situation à Mayotte et ce que vivent les Mahorais et les Mahoraises est totalement insupportable.
M. Maxime MinotExactement !
M. Gabriel AttalEt si cette situation était vécue dans un département de l’Hexagone, nous en entendrions parler matin, midi et soir dans les médias.
Mme Christine ArrighiQui est au Gouvernement ?
M. Gabriel AttalCette situation, vous l’avez souligné, indigne les élus locaux et les parlementaires – vous avez cité le député Kamardine, mais c’est aussi le cas de la députée Estelle Youssouffa, mobilisée sur cette question, ou des sénateurs, qui m’ont interrogé la semaine dernière à ce sujet.Dans l’immédiat, la priorité est de rétablir l’ordre public et de permettre la reprise des activités. Sous l’autorité du préfet et du procureur de la République, les forces de l’ordre luttent contre les violences urbaines et interpellent le plus grand nombre possible de délinquants – permettez-moi de saluer leur engagement.Nous devons aussi entendre les revendications des manifestants, qui protestent contre une situation tout simplement insupportable. Toutefois, pour ce faire, il faut pouvoir se parler : c’est pourquoi j’invite les collectifs à saisir les invitations des élus et du représentant de l’État à échanger. Les manifestants comme les élus demandent le retour à l’ordre et l’évacuation du camp de migrants installé dans le stade de Cavani. J’ai annoncé le 24 janvier dernier au sénateur Saïd Omar Oili, qui m’interrogeait à ce sujet, que l’opération de démantèlement du camp démarrerait le lendemain – ce qui a été fait. À ce stade, 200 personnes ont été évacuées, mais il en reste 500 ; c’est pourquoi je demande une accélération des opérations d’évacuation.
M. Raphaël SchellenbergerIl ne faut pas simplement demander ! Il faut faire !
M. Gabriel AttalJe le dis très clairement et très fermement : le démantèlement de ce camp est en cours et sera mené à son terme.Le Gouvernement agit aussi sur les causes d’une telle situation.
M. Fabien Di FilippoIl faut appliquer la loi immigration !
M. Gabriel AttalNotre premier objectif est de prévenir les arrivées irrégulières à Mayotte, en luttant contre les filières de l’immigration illégale. Nous avons, vous le savez, considérablement renforcé les moyens pour lutter contre ces filières, dont plusieurs ont été démantelées. Des condamnations ont été prononcées et ont donné lieu à de lourdes peines de prison ferme.J’ai bien conscience – même si je n’occupais pas encore mes fonctions actuelles – des dispositions qui avaient été proposées dans le cadre du projet de loi sur l’immigration s’agissant de Mayotte. Je sais également que le Conseil constitutionnel les a censurées. Dans le cadre du futur projet de loi relatif à Mayotte, nous devrons remettre ce travail sur la table…
M. Pierre-Henri DumontQuand ?
M. Gabriel Attal…et faire en sorte que les mesures soient adoptées et, surtout, validées par le Conseil constitutionnel.Ensuite, nous devons être plus efficaces afin d’expulser plus rapidement les étrangers qui ne détiennent pas de titre de séjour – y compris les ressortissants de pays africains. Les déboutés de l’asile font systématiquement l’objet d’une décision d’éloignement, qu’il faut exécuter dans les meilleurs délais : cinquante départs sont prévus cette semaine et une centaine d’éloignements sont prévus la semaine prochaine.
M. Raphaël SchellenbergerC’est un chiffre quotidien à Mayotte, ça, pas un chiffre hebdomadaire !
M. Gabriel AttalJe souhaite que l’on accélère notre action. L’ensemble de ces mesures seront renforcées dans le cadre du plan interministériel Shikandra de lutte contre l’immigration irrégulière, qui est en cours de refonte.Enfin, il faut donner à Mayotte les moyens de mieux lutter contre l’immigration irrégulière, l’insécurité et leurs conséquences. Il faut donner à Mayotte les moyens de son développement sur le long terme. Tel est l’objectif, vous l’avez rappelé, du projet de loi relatif à Mayotte que le Gouvernement présentera, après en avoir débattu et y avoir travaillé avec les élus concernés. Je souhaite que ce travail se déroule dans les toutes prochaines semaines.
M. Fabien Di FilippoIl y a de la place dans l’agenda parlementaire !
Mme la présidente
La parole est à M. Olivier Marleix.
M. Olivier MarleixCela fait au moins sept ans que notre collègue Mansour Kamardine vous alerte, mois après mois, sur cette situation intolérable.
M. Raphaël SchellenbergerEh oui !
M. Fabien Di FilippoSept ans !
M. Olivier MarleixLes résultats ne sont pas au rendez-vous. Il faut changer d’échelle et mobiliser notamment des moyens de la marine nationale pour, enfin, défendre Mayotte.
Question de M. Fabrice BRUN - Crise agricole
Mme la présidente
La parole est à M. Fabrice Brun.
M. Fabrice BrunMonsieur le Premier ministre, les tracteurs sont tout juste rentrés dans les fermes de France et déjà les déclarations contradictoires des membres de votre gouvernement fusent dans le plus grand désordre.
M. Patrick HetzelIl a raison !
M. Fabrice BrunSi vous pensez avoir berné les agriculteurs ou avoir acheté leur silence, vous faites une grave erreur. Soyez conscient que sans traduction de vos paroles en actes d’ici le Salon de l’agriculture, le retour de manivelle sera terrible : terrible pour notre agriculture et notre alimentation ; terrible pour notre économie, qui ne résisterait pas à l’agglomération de toutes les colères après sept ans de fracturation macroniste. Oui, les agriculteurs veulent vivre dignement de leur métier.
M. Fabien Di FilippoIl a raison !
M. Fabrice BrunPlus de rémunérations, moins de charges, moins de normes et un cap clair : pas d’interdiction sans solution. Stop à la surtransposition à la française. Arrêtez « d’emmerder » les agriculteurs et les éleveurs français ! Contrôlez plutôt les rayons et les containers.Nous n’en pouvons plus de cette concurrence déloyale, de ces produits qui ne respectent pas les mêmes normes que nous. Juste échange, réciprocité des normes, exonérations de charges sur la main d’œuvre saisonnière et permanente, choc de simplification, réparation de l’injustice des retraites agricoles, prédation, gazole non routier (GNR), plan Écophyto, application stricte de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, la loi Egalim : les solutions existent ; c’est d’abord et toujours une question de volonté politique.
M. Marc Le FurTrès bien !
M. Fabrice BrunComme pour l’eau, qu’il faut stocker l’hiver pour l’utiliser l’été, partout où c’est possible, et pas au cas par cas, selon le bon vouloir de votre administration. C’est du bon sens paysan, comme les soixante propositions de notre livre blanc.La Gouvernement sera-t-il au rendez-vous des promesses au Salon de l’agriculture ? Vous êtes attendu au tournant !
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Marc FesneauVous avez fait la liste de sujets que nous avons nous-mêmes mis sur la table. Ni le Président de la République, ni le Premier ministre, ni aucun membre du Gouvernement ne considère en avoir fini avec cette crise. Nous avons apporté des réponses immédiates à certaines crises – la crise bovine et la crise viticole notamment –, mais, vous avez raison, les agriculteurs attendent aussi des réponses dans la durée,…
M. Frédéric BoccalettiIls attendent depuis sept ans déjà !
M. Marc Fesneau…avant le Salon de l’agriculture, mais aussi après ! Pour répondre à des difficultés qui durent depuis trente ans, il faut agir dès aujourd’hui, mais aussi dans la durée. D’ici au Salon de l’agriculture, nous allons travailler à des mesures de simplification. Le Premier ministre a déjà annoncé certaines d’entre elles, qu’il s’agisse des délais de recours ou de la lourdeur des procédures. Nous travaillons également avec les organisations professionnelles départementales, sous l’égide des préfets, pour identifier toutes les simplifications possibles. Croyez-moi, la sédimentation depuis des dizaines d’années est grande ! C’est ainsi que nous entendons avancer.
M. Maxime MinotEn sept ans, vous n’avez pas beaucoup avancé !
M. Marc FesneauAu niveau européen, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a souligné la nécessité de relancer le dialogue et la coopération entre les États membres pour que la politique agricole commune (PAC) permette la transition écologique tout en garantissant la souveraineté agricole. Voilà le chantier que nous devons engager. Outre les mesures de court terme, nous prévoyons des mesures pour favoriser l’installation des agriculteurs dans le cadre du projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles qui sera présenté au Parlement d’ici le mois de juin.
M. Marc Le FurC’est trop long !
M. Marc FesneauLe calendrier que nous prévoyons permettra deux lectures au Sénat et à l’Assemblée avant juin. Je suis sûr que vous nous soutiendrez dans notre volonté d’engager la transition écologique et de protéger la souveraineté agricole !