Mme la présidente

La parole est à M. Michel Herbillon.

M. Michel Herbillon

Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en matière de politique économique, le Gouvernement n’est jamais avare d’éloges sur ses résultats – vous nous en donnez une illustration depuis le début de la séance.

M. Sylvain Maillard

C’est que ces résultats sont bons !

M. Michel Herbillon

Pourtant, nous franchissons un niveau historique d’endettement et nous sommes déjà les vice-champions du monde des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques.Et voilà qu’un nouveau record vient de tomber : celui du déficit commercial qui a doublé en 2022 – 164 milliards d’euros, du jamais vu, la pire performance des pays de l’Union européenne !

M. Thomas Ménagé

Une réussite, ça aussi !

M. Jocelyn Dessigny

Eh oui ! Le Mozart de la finance a encore frappé !

M. Michel Herbillon

Dans le même temps, l’Allemagne affiche un excédent de 76 milliards d’euros tandis que l’Italie est en train de renouer avec une balance commerciale positive. Bien sûr, une grande part de cette dégradation s’explique par la hausse des prix de l’énergie, du pétrole, du gaz, que nous importons, mais aussi de l’électricité. Car oui, alors que la France exportait, jadis, son électricité, elle a été contrainte d’en importer à grands frais tant vous avez affaibli notre parc nucléaire et notre souveraineté énergétique.

M. Grégoire de Fournas

Quel bilan !

M. Michel Herbillon

Mais tout cela, c’est l’arbre qui cache la forêt. La réalité, c’est qu’en vingt ans, la part de la France dans les exportations mondiales a diminué de moitié, de 5 à 2,5 %. La réalité, c’est l’effondrement de notre industrie manufacturière, tombée pour la première fois sous les 10 % du PIB. Le bilan est simple : en dépit d’efforts très insuffisants sur les impôts de production, votre politique de réindustrialisation ne produit pas de résultats et nos entreprises ne sont pas encore assez compétitives.

M. Patrick Hetzel

Très juste !

M. Michel Herbillon

Monsieur le ministre, votre majorité est au pouvoir depuis six ans et Emmanuel Macron, auparavant secrétaire général adjoint de la Présidence de la République puis ministre de l’économie et de l’industrie, l’est depuis onze ans.

M. Sébastien Chenu

Il a raison !

M. Grégoire de Fournas

Il était ministre depuis 2016 !

M. Maxime Minot

Je n’étais même pas né !

M. Michel Herbillon

Vous ne pouvez donc pas vous exonérer de votre responsabilité en reportant toujours la faute sur les autres. Alors, allez-vous enfin défendre notre souveraineté industrielle pour que la France soit compétitive et pour que nos entreprises regagnent des parts de marché à l’étranger ?

M. Patrick Hetzel

Bravo !


Mme la présidente

La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger.

Un député du groupe RN

Qui est ce monsieur ?

M. Jocelyn Dessigny

Ce n’est pas très courageux, c’est M. Le Maire qui était interrogé !

M. Olivier Becht

Nous serons d’accord sur un point : la balance des biens a atteint le déficit record de 164 milliards d’euros. Ce n’est pas le déficit commercial. Ce dernier prend en effet en compte la balance des services et la balance des revenus. Or la balance des services est caractérisée par un excédent record de plus de 50 milliards d’euros.

M. Michel Herbillon

Tout va bien, alors !

M. Olivier Becht

Et la balance des revenus a elle aussi un excédent record de plus de 31 milliards d’euros. En ce qui concerne la balance des biens, elle s’est en effet dégradée,…

M. Grégoire de Fournas

À cause de vous !

M. Olivier Becht

…vous l’avez dit vous-même : notre parc nucléaire était en effet en partie à l’arrêt parce qu’il fallait rattraper les deux années pendant lesquelles, du fait de la pandémie, la maintenance n’a pas pu être réalisée ; en outre, sur les marchés, le prix de l’énergie a doublé. Cette part conjoncturelle du déficit s’effacera d’elle-même.

M. Sébastien Chenu

Mais personne ne croit à ce que vous racontez !

M. Olivier Becht

Il y a en revanche, et vous avez raison, une part structurelle du déficit due à la désindustrialisation du pays pendant vingt-cinq ans.

M. Michel Herbillon

Mais vous êtes au pouvoir désormais !

M. Olivier Becht

Or ce phénomène s’est inversé puisque nous sommes dans une phase de réindustrialisation avec plus d’usines qui ouvrent que d’usines qui ferment.

M. Aurélien Pradié

Ne nous montrez pas du doigt !

M. Olivier Becht

Nous avons des projets concrets : les semi-conducteurs produits à Crolles, le paracétamol en Isère, le lithium dans l’Allier et dans le Bas-Rhin…

M. Aurélien Pradié

Baissez donc votre doigt !

M. Olivier Becht

Nous sommes devenus le premier pays d’accueil des investissements en Europe.

M. Julien Odoul

Le premier pays d’accueil tout court !

M. Olivier Becht

On compte 1 222 projets qui créent des emplois dans l’ensemble des territoires.Ensuite, même si plus de 144 000 entreprises exportent, les petites et moyennes entreprises le font insuffisamment. Or ce sont ces PME qu’il faut inciter à exporter, d’aller à la conquête de nouveaux marchés. C’est ce à quoi s’emploie le Gouvernement.

M. Michel Herbillon

Vous ne semblez pas mesurer que le déficit commercial est de 164 milliards d’euros !


 

Mme la présidente

La parole est à M. Xavier Breton.

M. Xavier Breton

Madame la ministre de la culture, de très nombreuses personnes ont été choquées par les menaces que vous avez formulées à l’encontre des chaînes C8 et CNews.

Mme Anne-Laure Blin

Inadmissible ! Scandaleux !

M. Xavier Breton

En menaçant ces chaînes…

M. Matthias Tavel

Dirigées par des délinquants !

M. Xavier Breton

…de ne pas renouveler leurs fréquences TNT – télévision numérique terrestre –, vous avez bien sûr heurté…

M. Patrick Hetzel

Le respect de la loi !

M. Xavier Breton

…les téléspectateurs qui y trouvent une autre manière de s’informer, mais aussi tous ceux qui sont attachés au pluralisme de l’information. Vous avez scandalisé tous ceux qui défendent cette grande liberté constitutionnelle qu’est la liberté d’expression.Dans une démocratie, sur un sujet aussi sensible que l’information, un gouvernement se doit d’observer une stricte réserve. En aucun cas, il ne doit prendre parti. Or c’est pourtant ce que vous avez fait, menaçant ainsi la liberté d’expression et remettant en cause l’indépendance de l’Arcom, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique.

M. Patrick Hetzel

Eh oui !

M. Éric Bothorel

Ce n’est pas vrai !

M. Xavier Breton

Normalement, l’Arcom est une autorité publique indépendante mais, par vos propos, vous l’avez discréditée en instillant le doute sur son indépendance et son impartialité.Allez-vous observer dès lors une stricte neutralité, afin de respecter la liberté d’expression et le pluralisme de l’information ?


Mme la présidente

La parole est à Mme la ministre de la culture.

M. Éric Ciotti

Et de la censure !

Mme Rima Abdul-Malak

Soit vous n’avez pas écouté mon interview

M. Éric Ciotti

Si !

Mme la présidente

Veuillez laisser Mme la ministre s’exprimer.

Mme Rima Abdul-Malak

…soit vous tenez absolument à déformer mes propos, peut-être pour détourner le regard des faits et du cadre légal, que je vais essayer de rappeler.La loi de 1986 relative à la liberté de communication, qui est une loi très importante de notre démocratie, prévoit-elle des obligations pour les chaînes bénéficiant de fréquences gratuites, ce qui est le cas des chaînes de la TNT ? Oui. Si ces chaînes ne respectent pas leurs obligations, s’exposent-elles à des sanctions ? Oui. Est-ce au CSA – Conseil supérieur de l’audiovisuel –, devenu l’Arcom, de prononcer ces éventuelles sanctions ?

M. Éric Ciotti et M. Maxime Minot

Oui !

M. Olivier Marleix

Et pas à vous !

Mme Rima Abdul-Malak

Une fois encore, la réponse est oui. Je n’ai jamais dit le contraire et toujours rappelé ce qui relève du rôle de l’Arcom.Quelles sont ces obligations ? Il me semble important de les rappeler aujourd’hui, sachant qu’elles s’appliquent à toutes les chaînes.

M. Patrick Hetzel

C’est pour ça que vous en n’avez visé qu’une !

Mme Rima Abdul-Malak

Les chaînes doivent : traiter les affaires judiciaires avec mesure, assurer l’expression des différents points de vue sur les sujets qui prêtent à controverse, respecter l’indépendance de l’information, notamment vis-à-vis des intérêts économiques des actionnaires ou des annonceurs, lutter contre les discriminations, respecter la dignité des personnes, etc.Quel constat faisons-nous – vous me donnez ici l’occasion de compléter les réponses que j’ai données lors de l’interview que vous avez évoquée ? Prenons les décisions – elles sont publiques – prises par l’Arcom depuis 2019 à l’égard des chaînes de la TNT qui, je le répète, bénéficient de fréquences gratuites et doivent à ce titre respecter certaines obligations. L’autorité n’est intervenue aucune fois pour TF1 et M6, deux fois pour France Télévisions et une vingtaine de fois pour les deux chaînes que vous mentionnez.

M. Éric Ciotti

C’est parce qu’elles sont dans l’opposition !

Mme Rima Abdul-Malak

Il n’a jamais été question d’interdire ou de menacer telle ou telle chaîne ni de s’immiscer dans les pouvoirs du régulateur, qui est strictement et absolument indépendant. Si rappeler les termes de la loi, c’est, pour vous, faire acte de censure, alors nous n’avons pas la même définition de la censure.

M. Éric Ciotti

Même Bruno Le Maire est d’accord.


Mme la présidente

La parole est à M. Xavier Breton.

M. Xavier Breton

Une meilleure réponse aurait été de reconnaître qu’une stricte neutralité s’impose à vous, en tant que ministre.

M. Charles Sitzenstuhl

Il fait les questions et les réponses !

M. Xavier Breton

J’entends votre réponse, je ne vais pas plus loin, mais le problème, c’est que plus vous parlez, plus vous vous enfoncez. Vous rappelez le cadre légal tout en menaçant. Il faut faire attention. Toutes les chaînes de télévision ne correspondent pas à la pensée unique et à la bienséance que vous vous voulez imposer et il y a des réactions.

Mme Caroline Abadie

Le racisme n’est pas une pensée !

M. Xavier Breton

Les libertés sont mises en danger dans notre pays : liberté de manifestation, liberté de culte, liberté de communication. Faisons attention !


 

Mme la présidente

La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie

Madame la Première ministre, vous le savez, les membres du groupe Les Républicains sont attachés au système de retraite par répartition voulu par le général de Gaulle, fondé sur le principe de la solidarité entre générations et préservé par les différentes réformes – notamment celles menées par MM. Balladur, Chirac, Fillon ou Sarkozy.La réalité démographique actuelle menace l’équilibre du système et une réforme est donc nécessaire. Elle est même devenue urgente, le Président de la République ayant renoncé à agir sous son précédent mandat. Refusant la baisse des pensions, comme la hausse des cotisations, les députés du groupe Les Républicains ont obtenu du Gouvernement qu’il renonce à relever l’âge légal de départ à la retraite à 65 ans ; ils ont également obtenu la revalorisation des petites pensions…

Plusieurs députés du groupe RN

Non !

Mme Véronique Louwagie

…et l’abandon du prélèvement envisagé sur le système de retraite complémentaire Agirc-Arrco. Cependant, d’autres avancées restent nécessaires. Nous voulons notamment que cette réforme soit un véritable instrument de redistribution, par exemple à destination des mères de famille qui ont eu des carrières hachées.Ma question porte sur la prise en compte de la spécificité des carrières longues et vise à s’assurer qu’absolument personne ne pâtira de la réforme. En effet, alors que nous relevons l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, il est impératif qu’une attention encore plus importante soit portée à ceux qui ont commencé à travailler tôt. Pouvez-vous assurer qu’aucune des personnes engagées dans une carrière longue, telle que définie par la réforme dite Fillon de 2003, ne travaillera plus de 43 ans ?


Mme la présidente

La parole est à Mme la Première ministre.

Mme Élisabeth Borne

Vous m’interrogez sur un point essentiel de notre projet pour les retraites. Comme j’ai eu l’occasion de le dire dès le 10 janvier, lors de la présentation de la réforme, la prise en compte de la situation de celles et ceux qui ont commencé à travailler tôt est l’un des marqueurs forts de ce projet. Beaucoup a été dit et écrit à ce propos, y compris des inexactitudes et des contre-vérités.

Un député du groupe SOC

Notamment par le Gouvernement !

Mme Élisabeth Borne

Je veux donc souligner le plus clairement possible que, si nous sommes attentifs à préserver la cohérence globale du projet, le Gouvernement – à la différence de certains dans cet hémicycle qui font obstacle au débat – a écouté et fait évoluer son projet en fonction des arguments et des propositions défendus par les uns et les autres.

M. Fabien Di Filippo

Qui sont les uns et les autres ?

Mme Élisabeth Borne

La cohérence impose de rappeler que notre système de retraite subordonne le bénéfice d’une pension au respect d’une double condition d’âge de départ et de durée de cotisation. Le dispositif dit de carrière longue, qui reprend ces règles, concerne spécifiquement ceux qui ont travaillé quatre ou cinq trimestres avant un certain âge. Nous ne touchons pas à ces principes ; nous améliorons même la situation de ceux qui ont commencé à travailler le plus tôt.J’ai eu l’occasion de l’indiquer il y a une dizaine de jours, nous étendrons ce dispositif à ceux qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans – c’est-à-dire ont cotisé quatre ou cinq trimestres avant la fin de l’année civile de leur 21 ans – et respectent les conditions de durée de cotisation, pour leur permettre un départ anticipé à la retraite à l’âge de 63 ans. Pourquoi avons-nous évolué sur ce point ?Initialement, il était prévu qu’à partir de 2030, pour partir à la retraite, ces personnes devraient avoir atteint l’âge légal prévu à l’article 7 du projet de loi, 64 ans, ce qui portait leur durée de cotisation à quarante-quatre ans. Or j’ai pris un engagement, qui donne lieu à un amendement déposé aujourd’hui par le Gouvernement, afin de préciser que, dès lors que l’âge de départ anticipé à la retraite pour carrière longue est atteint, la réforme ne prévoit pas de durée de cotisation supérieure à quarante-trois ans. Ceux qui ont commencé à travailler à 17 ans – et dont l’âge de départ anticipé est fixé à 60 ans – bénéficieront donc également de la mesure.

M. Aurélien Pradié

Vous oubliez ceux qui ont commencé à travailler à 16 ans !

Mme Élisabeth Borne

Je suis attachée au principe d’aménagement des règles pour les carrières longues, fixé à l’époque dans une réforme défendue par François Fillon. Je suis attachée plus globalement aux règles de notre système de retraite, fondé sur un double critère d’âge de départ et de durée de cotisation. Je suis attachée par-dessus tout à la viabilité de notre système de retraite par répartition. C’est précisément pour cela qu’il est indispensable d’en assurer l’équilibre.Je mesure ce que cela représente pour chacun de nos concitoyens, pour chaque Français dans sa vie quotidienne. Le débat parlementaire est précieux pour éclairer ces enjeux et le travail sur les décrets sera conduit dans la transparence. Nous proposerons à des parlementaires de chaque groupe de s’y associer.Oui, dans des réformes comme celle-ci, des points qui peuvent paraître techniques ne sont pas secondaires et les simplifications sont rapidement mensongères. J’assume que le Gouvernement et moi-même ayons toujours des expressions précises, sans doute trop peu lyriques au goût de certains, pour en parler. C’est la condition de la vérité et je n’y dérogerai pas.


Mme la présidente

La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie

Je vous remercie pour cette réponse. Nous sommes tous attachés au caractère mixte de la réforme, combinant relèvement de l’âge de départ à la retraite et prise en compte de la durée de cotisation. Le plus souvent, les métiers dans lesquels on entre tôt sont physiquement exposés. Il importe donc que tous ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans bénéficient d’un aménagement…

Mme la présidente

Je vous remercie, chère collègue.

Mme Véronique Louwagie

…pour que la réforme soit juste et équilibrée.


 

Mme la présidente

La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel

Madame la Première ministre, vous parlez souvent de République exemplaire. C’est pourquoi je voudrais vous interroger au sujet d’une situation qui est, hélas, loin d’être exemplaire. En effet, il s’agit de quelqu’un qui est champion de France des mises en examen et qui, pourtant, continue d’être membre du cabinet et conseiller du Président de la République – M. Solère, pour ne pas le nommer. Si je vous interroge, c’est parce que nous savons désormais qu’en sa qualité de conseiller du Président, il a eu accès à des informations en provenance du ministère de la justice, pourtant censées rester secrètes, sur une enquête en cours.

M. Ian Boucard

C’est scandaleux !

M. Patrick Hetzel

Or ces informations ont ensuite été transmises par M. Solère à celui qui était visé par l’enquête.

M. Maxime Minot

Sans foi ni loi !

M. Patrick Hetzel

Résultat : cette interférence a permis de protéger un réseau de trafiquants de drogue depuis la présidence de la République avec l’appui de l’un de vos ministères.

M. Fabien Di Filippo

Incroyable !

M. Patrick Hetzel

Madame la Première ministre, que comptez-vous faire pour que l’exemplarité que vous revendiquez ne soit pas qu’un discours mais se traduise véritablement dans les actes ?


Mme la présidente

La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

M. Olivier Véran

Il faut arrêter la calomnie. Ce que vous donnez ici, c’est l’interprétation d’un article de que j’ai moi-même lu ; soit nous n’avons pas lu le même article, soit nous ne l’avons pas vu avec les mêmes yeux. L’article est très clair : il reprend lui-même les propos du procureur général de Nanterre, lequel indique qu’il n’avait pas du tout eu connaissance de l’affaire qui intéresse le député auquel vous faites allusion.

M. Michel Herbillon

Il n’est pas député !

M. Pierre Cordier

Arrêtez de noyer le poisson !

M. Olivier Véran

Si le procureur général de Nanterre dit lui-même publiquement qu’il n’est pas au courant, comment voulez-vous que la Chancellerie le soit ? J’irai encore plus loin : comment voulez-vous que la Chancellerie fomente je ne sais quel complot ayant pour conséquence d’empêcher le démantèlement d’un réseau de trafic de drogue ?

M. Marc Le Fur

Ce n’est pas clair !

M. Olivier Véran

Enfin, monsieur le député, soyons sérieux, s’il vous plaît.

M. Olivier Marleix

Mis en examen et conseiller du Président de la République, cela ne vous dérange pas ?


Mme la présidente

La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel

Monsieur le ministre délégué, votre réponse est hallucinante. Treize mises en examen, triez, pour M. Solère ! Je vais en citer quelques-unes : détournement de fonds publics, trafic d’influence, financement illicite de campagne électorale, recel d’abus de biens sociaux… En somme, nous l’aurons tous compris, le Président de la République et sa majorité protègent un multirécidiviste. Bravo pour l’exemplarité !


Mme la présidente

La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

M. Olivier Véran

Sans reprendre mot pour mot ce qu’a dit tout à l’heure la Première ministre, je vous rappelle que vous êtes parlementaire, pas procureur. Vous parlez d’un parlementaire qui est lui-même mis en examen ; la justice tranchera.

Plusieurs députés du groupe LR

Il n’est pas parlementaire !

M. Olivier Véran

Pour le reste, je crois avoir fait la démonstration, par la lecture de l’article de sur lequel vous fondez votre question, que les hallucinations ne sont peut-être pas du côté que vous croyez.


 

Mme la présidente

La parole est à M. Francis Dubois.

M. Francis Dubois

Ma question porte sur les conséquences de votre réforme des retraites sur ceux qui exercent des métiers pénibles et ont des carrières hachées.En milieu rural et notamment en Corrèze, territoire fracturé par vos politiques successives, il y a beaucoup de femmes, conjointes d’agriculteurs qui, après avoir élevé leurs enfants, commencent ou reprennent une activité car le revenu agricole de leur conjoint ne suffit pas à subvenir à l’ensemble des besoins de leur famille. Elles reprennent la plupart du temps un emploi dans des métiers de service, le plus souvent comme aide-ménagère à domicile au service de nos seniors ou comme agent de service en Ehpad. J’en profite pour préciser que les agents de service en milieu médico-social font partie des oubliés du Ségur.

M. Thibault Bazin

Eh oui !

Mme Emmanuelle Anthoine

Il a raison !

M. Francis Dubois

De fait, en reprenant ainsi une activité tardive, elles ne disposeront pas d’une carrière complète et, arrivées à 64 ans, elles ne pourront prétendre à la pension minimale de 1 200 euros pour tous, mesure proposée initialement par le groupe LR, puis reprise par le Gouvernement.Monsieur le ministre, ma question est simple : que diriez-vous à Cécile, agent de service à l’Ehpad de Neuvic en Corrèze, mère de deux enfants qui, à l’âge de 64 ans, aura travaillé trente ans , soit 120 trimestres auxquels ne s’ajoutent que quatre trimestres par enfant – au lieu de huit dans le privé –, ce qui représente au total trente-deux années de service ? Elle aura eu une carrière usante et pénible, en travaillant le dimanche et les jours fériés, mais surtout une carrière incomplète. Quel sera le montant de sa pension ? Sera-t-il décent ?

M. Fabrice Brun

Bravo !


Mme la présidente

La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

M. Olivier Dussopt

La question que vous posez renvoie finalement à deux situations distinctes. La première concerne les territoires très ruraux – la Corrèze en fait partie, tout comme l’Ardèche, dont je suis élu – et les retraites agricoles. Vous avez notamment évoqué les carrières incomplètes. À l’occasion de l’examen du projet de loi que nous vous soumettons, nous proposons, par exemple, de compléter les dispositions qui ont été adoptées avec les propositions de loi visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles, que votre assemblée a examinées à l’initiative du président Chassaigne.Il s’agit de faire en sorte que l’éligibilité à la retraite minimale des agriculteurs, qui est pour le moment réservée à ceux qui ont eu une carrière complète d’exploitants agricoles indépendants, soit élargie à ceux qui ont dû abréger leur carrière du fait d’un problème d’incapacité ou d’inaptitude. Ce sont 45 000 retraités agricoles supplémentaires que nous allons ainsi pouvoir aider.

M. Jean-Yves Bony et M. Vincent Descoeur

Ce n’est pas cela, la question !

M. Olivier Dussopt

Vous m’interrogez aussi sur la situation des conjoints d’agriculteurs, qui sont très souvent des femmes ayant eu une carrière incomplète, parce qu’elles se sont occupées de leurs enfants ou ont exercé en tant qu’aidantes. Nous allons véritablement les accompagner, et de deux manières. Nombre de nos dispositions vont permettre de rehausser d’une centaine d’euros la retraite des conjointes collaboratrices et des conjoints collaborateurs,…

Mme Clémence Guetté

Vous êtes trop généreux, monsieur le ministre ! Une centaine d’euros, c’est incroyable !

M. Olivier Dussopt

…et ainsi permettre à ces femmes – pour l’essentiel – de voir leur retraite à nouveau revalorisée. Et puis nous allons faire autre chose : nous allons faire en sorte que des trimestres cotisés au titre de l’assurance vieillesse du parent au foyer (AVPF), que vous avez évoquée, ou du temps passé à exercer en tant qu’aidant, soient pris en compte de deux manières : la possibilité d’un départ anticipé pour carrière longue, par l’intégration de ces trimestres dans la durée requise de cotisation, et l’éligibilité au minimum de pension.

Mme Clémence Guetté

C’est le !

M. Olivier Dussopt

S’agissant de ce minimum de pension – vous le savez, monsieur le député –, l’objectif est de garantir 85 % du Smic à ceux qui ont une carrière complète rémunérée au niveau du Smic. Mais tous ceux qui iront au-delà de trente années cotisées par le travail ou par la validation de ces trimestres verront leur retraite revalorisée. C’est ainsi que 1,8 million de retraités actuels vont voir leur pension revalorisée, de même que 200 000 nouveaux retraités chaque année – sur les 800 000 départs à la retraite annuels. Sommes-nous au bout du chemin ? Non, mais c’est un progrès.


Mme la présidente

La parole est à M. Francis Dubois.

M. Francis Dubois

Outre le fait qu’ils sont les oubliés du Ségur, c’est pour les raisons que j’ai évoquées que, le 31 janvier dernier – et aujourd’hui encore –, tous les employés de l’Ehpad de Neuvic, y compris les personnels soignants, étaient grévistes tout en restant à leur poste auprès de nos seniors. En effet, ces femmes n’acceptent pas de travailler deux ans de plus pour une pension inférieure à 1 200 euros. Elles estiment que vous ne prenez pas en considération la pénibilité de leur emploi et leur dévouement auprès de nos aînés.


 

Mme la présidente

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz

Ma question s’adresse à Mme la Première ministre.Si notre système de retraite par répartition est bien menacé par des déficits à venir, on ne réglerait qu’une partie des problèmes en les envisageant uniquement au travers du prisme financier.

M. Pierre Cordier

Très bien !

Mme Marie-Christine Dalloz

Vous le savez, les députés Les Républicains sont très attachés à la revalorisation des petites retraites – ils sont d’ailleurs peut-être les seuls à évoquer souvent cette question.

M. Sylvain Maillard

Oh !

Mme Marie-Christine Dalloz

Vous avez répondu à notre attente en acceptant d’étendre aux retraités actuels le dispositif prévoyant une pension à 1 200 euros.

M. Sébastien Jumel

Ça ne fait pas le compte !

Mme Marie-Christine Dalloz

Dimanche, vous avez également annoncé que vous ouvriez le dispositif des carrières longues à ceux qui ont commencé à travailler entre 20 et 21 ans, lesquels pourront ainsi partir à 63 ans et percevoir une retraite pleine avec quarante-trois annuités au lieu de quarante-quatre. Nous vous en remercions.Une difficulté persiste à propos des personnes qui ont commencé une carrière longue, voire très longue, avant l’âge de 18 ans. En effet, pour ces dernières, une durée de carrière de quarante-quatre ans sera nécessaire si elles veulent atteindre une retraite à taux plein.Comment comprendre ce traitement différent, cette pénalité d’un an au détriment des Français qui ont commencé à travailler très jeunes ? Je pense notamment aux apprentis, à ceux qui exercent des métiers manuels – ils sont nombreux dans nos circonscriptions. Comptez-vous améliorer le dispositif pour l’ensemble de ces personnes et enfin répondre à une attente légitime ?


Mme la présidente

La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

M. Olivier Dussopt

Je veux tout d’abord insister sur le fait que vous avez pris acte – et je vous en remercie – de plusieurs annonces faites par Mme la Première ministre à la suite de demandes émises par votre groupe mais aussi, car je ne veux oublier personne, par des groupes et par des parlementaires de la majorité. Cela dit, lorsque les choses vont dans le bon sens, peu importe qui en est à l’origine, l’essentiel est qu’elles avancent. Comme on dit parfois, lorsque le bébé est beau, il a plusieurs pères. En l’occurrence, il faut peut-être s’en féliciter si cela permet d’améliorer la loi.Vous avez évoqué la question des carrières longues en précisant – et je vous en remercie – que la Première ministre avait répondu à une attente en permettant à celles et ceux qui commencent à travailler avant 21 ans de bénéficier d’un départ anticipé d’un an, à condition, bien sûr, d’avoir cotisé cinq trimestres, comme le prévoient l’ensemble des dispositifs dits carrières longues. L’idée est, comme toujours, de rapprocher la durée de cotisation requise pour ceux qui commencent à travailler tôt de celle requise pour ceux qui commencent plus tard.Je l’ai dit tout à l’heure dans ma réponse à une autre question : avant 2003, l’écart entre ces durées de cotisation pouvait atteindre huit à neuf ans. Il faut souligner que, réforme après réforme, l’écart entre la durée d’affiliation au régime, dite DAR, soit la durée minimale exigée, pour ceux qui commencent à travailler tard, et la durée effective pour ceux qui commencent à travailler tôt, n’a cessé de se réduire. C’est la preuve d’une marche vers l’égalité. Cela a été construit au fil des réformes.Lorsque le dispositif dit carrières longues a été créé en 2003,…

M. Mansour Kamardine

J’étais là !

M. Olivier Dussopt

…ceux qui avaient commencé à travailler avant 16 ans devaient cotiser cinq trimestres mais aussi deux années supplémentaires. Avec cette réforme, leur durée de cotisation doit être supérieure d’un an seulement. Nous avons dupliqué ce système pour l’appliquer à ceux qui ont commencé à travailler avant 18 ans.La critique que vous exprimez en creux porte en réalité sur le dispositif qui avait été mis en place par la réforme Fillon. Les débats qui s’ouvrent nous permettront d’avancer sur cette question et de discuter. Nous avons beaucoup progressé sur le chemin vers l’égalité. Nous devons poursuivre sur cette voie en ayant à l’esprit un principe : la durée de cotisation n’est pas un plafond mais un plancher ; et une volonté : assurer la solidité du système.

Mme Sophia Chikirou

Il essaie de nous anesthésier !


Mme la présidente

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz

Vous l’avez souligné, nous voulons travailler de manière responsable et dans l’intérêt général, ce qui me semble important. Cependant, la question des carrières longues est essentielle. Si l’on accepte l’idée que les personnes qui ont commencé à 20 ou 21 ans cotisent pendant seulement quarante-trois ans, acceptons qu’il en soit de même pour ceux qui ont commencé plus tôt et remplissent toutes les conditions.